Denis Darzacq

ARTPRESS N°446 / JUILLET-AOÛT 2017 / P. 34.
DENIS DARZACQ
GALERIE RX / 4 MAI – 17 JUIN 2017

Connu pour ses corps chorégraphiés dans l’espace de la ville, d’hypermarchés ou de musées, Denis Darzacq surprend avec deux séries qui déclinent les relations entre photographie et objet. Les Contreformes (2017) sont des natures mortes de morceaux de chaises Ikéa, dont l’artiste exploite les courbes et les droites, ou de rebuts, tel du polystyrène ou un parpaing aux riches effets de surface. Darzacq ne les montre pas tels qu’ils sont. Il les transforme en recourant au montage numérique, à l’inversion du positif et du négatif et à l’agrandissement. Ces natures mortes tendent vers une abstraction picturale ou sculpturale. Darzacq évite pourtant le plus souvent l’écueil du formalisme en ne renonçant pas au pouvoir descriptif de la photographie qui fait des Contreformes autant un commentaire sur le consumérisme et son revers qu’une recherche esthétique de poétisation de l’ordinaire. Une telle poétisation semble aussi à l’œuvre dans les Doublemix (2015). Mais l’ordinaire est cette fois celui de photographies banales de Darzacq qui interagissent avec les céramiques d’Anna Luneman qui y sont incrustées. Leur hybridation s’inscrit dans l’histoire du collage surréalisant et les expérimentations actuelles autour de l’objet photographique. Elle prolonge parfois l’image d’origine mais joue le plus souvent sur le décalage. Elle n’a alors que l’apparence de la gratuité. Car elle peut faire sourire comme mettre mal à l’aise, à l’instar de ce Doublemix où, entre deux paisibles pavillons de banlieue, pointe une forme organique des plus phalliques.

Étienne Hatt

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Known for seemingly levitating bodiethat in streets, hypermarkets or museums, Denis Darzacq surprises us here with two series exploring the relations between photograph and object. His Contreformes (2017) are close-ups of Ikea chairs, emphasizing the curves and straight lines, or of junk, such as polystyrene or breezeblock with richly textured surfaces. Rather show them as they are, he transforms them by means of digital montage, enlargement, and the inversion of positive and negative. These still lifes tend towards abstraction but usually avoid the pitfall of formalism thanks to the descriptive power of photography, making these Contreformes as much a commentary on consumerism and its underside as an aesthetic exploration of the poeticization of the ordinary. This poeticization also seems to be at work in the Doublemix works (2015). But this time ordinariness is that of Darzacq’s banal photographs interacting with the ceramics by Anna Luneman that are inlaid in them. The hybridization continues on from surrealist collage and today’s experiments around the photographic object. It sometimes extends the original image but usually plays on discrepancy. It only seems gratuitous. It can both make us smile and disturb us, like the Doublemix in which, between two quiet suburban houses, an extremely phallic form rises up.

Translation, C. Penwarden


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